Dans la Harvard Business Review de mai, un article sur le potentiel de croissance du marché africain.
Un continent en croissance
La croissance du continent est régulière : supérieur à 4% depuis 2003. Avec des sommets en 2004 (5,6%), 2005 (5,2%), 2006 (5,8%) et 2007 (5,9%). Les impacts de la crise se faisant sentir en 2009 avec un petit 2% de croissance.
Depuis 2000 le continent a été la troisième région avec le plus de croissance sur la planète derrière l'Asie du Sud-Est (7,2%) et à égalité avec le Moyen-Orient (4,7%), loin devant l'Europe centrale et de l'Est (4,3%) et l'Amérique Latine (3,1%). Sur la même période la planète avait une croissance de 2,6%, plombée par les pays développés (1,5%).
Depuis 2000 les pays africains ont réduit leur dettes détenues par l'étranger de 82% du PIB à 59% et leurs déficits de 4,6% à 1,8%, et leurs taux d'inflation de 22% à 8%.
Le nombre moyen de conflits sérieux a baissé passant de 4,8 par an dans les années 90 à 2,6 dans les années 2000.
Enfin la croissance démographique du continent lui donne des perspectives uniques pour le futur.
L'émergence d'un marché intérieur
L'Afrique n'est plus seulement un lieu d'investissement pour produire à moindres coûts. Une classe de consommateurs émerge. Les ménages considérés comme des classes moyennes (10 000 à 20 000 dollars de revenus par an) est passée de 11% en 2000 à 14% en 2008 avec une perspective de 17% en 2020. Les consommateurs émergents (5 000 à 10 000 $ de revenus par an) sont passés quant à eux de 18% en 2000 à 21% en 2008 et sont prévus d'être 23% en 2020 (source : McKinsey Global Institute).
Un chiffre étonnant : en 2008 les Africains ont dépensé 860 milliards en biens et services, soit 35% de plus que les Indiens.
Trois considérations en voyant ces chiffres :
- L'ascension sociale est rapide : les classes moyennes se développent plus rapidement que les consommateurs émergents. Un marché de consommation intérieur est en train d'émerger très rapidement. Le développement du marché de la téléphonie mobile est un bon exemple (depuis 2000, 316 millions d'Africains se sont abonnés)
- Les revenus de la classe moyenne restent relativement faibles. Il sera donc nécessaire d'adapter l'offre.
- Enfin cela signifie qu'il reste encore une majorité de la population qui reste dans la misère.
Des situations très contrastées
Les économies nationales sont à des niveaux de développement très différents. Les auteurs distinguent quatre types d'économies en fonction de trois critères :
- la part du secteur manufacturier et de service dans le PIB.
- le montant des exportations par habitant.
- le PIB par habitant.
Les pays les plus riches (PIB par habitant supérieur à 5000$) sont de deux types :
- Guinée Equatoriale, Libye, Angola, Gabon et Algérie ont des économies de rente basées sur l'exploitation des hydrocarbures.
La part du manufacturier et des services y est faible (moins de 50%).
- L'Afrique du Sud et l'Ile Maurice, pays dans lesquels l'industrie et les services représentent plus de 95% du PIB et tournés vers l'exportation. Signalons à ce titre le modèle original de développement de l'Ile Maurice qui s'est tourné vers un développement durable et de qualité basé sur le tourisme haut de gamme et la montée en gamme des entreprises textiles de sa zone franche (son avantage coût du travail s'est réduit avec son développement et les industries bas de gamme se sont délocalisées).
Les auteurs distinguent donc quatre groupes de pays :
- Les exportateurs d'hydrocarbures.
Beaucoup sont riches (voir ci-dessus), d'autres le sont moins comme le Nigéria ou le Congo. Le Tchad est miséreux. Ces économies sont des économies de rente, dépendantes des cours internationaux. Dans certains pays la richesse produite est captée par les proches du régime ou les compagnies étrangères exploitantes, mais d'autres profitent de cette manne pour se diversifier. En Angola il est prévu que la banque de détail croisse de 6,8% par an d'ici 2020, les services de télécom de 5,2% et les biens de consommation hors nourriture de 4,4%. Au Nigéria la contribution des services à la croissance est légèrement supérieure à celle des matières premières.
- Les pays diversifiés.
Plus de 70% de leur PIB est généré par l'industrie et les services. Ils sont aussi très tournés vers l'exportation. Il s'agit de l'Afrique du Sud, la Tunisie, le Maroc, la Namibie, l'Egypte et la Côte d'Ivoire. C'est dans ces pays que la classe de consommateurs est la plus importante. Ils commencent à sérieusement attirer les investissements étrangers. Ainsi Walmart a pis le contrôle du premier distributeur sud-africain, Massmart qui a des magasins dans 13 autres pays africains.
- Les pays en transition.
Zambie, Sénégal, Mozambique, Kenya, Cameroon, Ouganda, Ghana et Tanzanie. La part du secteur primaire (agriculture et ressources) y reste importante. Le marché intérieur est moins développé mais offre des perspectives à plus long terme d'autant que certains de ses pays voient le secteur industriel et de service se développer rapidement.
- Les pays en prétransition.
Mali, République Démocratique du Congo, Ethiopie, Sierra-Leone, sont des pays pauvres, qui, pour certains (Congo, Ethiopie et Mali) se développent rapidement (plus de 7% par an depuis 2000). Ils ne constituent pas des marchés à court terme.
Points d'intérêts
On parle beaucoup du potentiel de développement en Asie du Sud-Est. L'article met en évidence celui qui existe en Afrique en soulignant les diversités de situations en fonction des pays. Pour qui s'intéresse à l'Afrique, l'article met en évidence plusieurs points :
- bien choisir le pays tête de pont et la stratégie d'entrée : croissance organique sur des marchés nouveaux (comme la distribution) ou acquisition sur des marchés déjà développés comme la banque ou les télécoms.
- adapter son offre à la réalité locale. Dans la classe moyenne, les revenus sont moins élevés, il y a aussi une masse de clients pauvres que l'on peut aller chercher. Tout ne peut pas s'inventer depuis les sièges et les centres de recherche occidentaux. La réalité locale impose des façons de voir différentes, révèle de nouvelles opportunités invisibles depuis Paris, New-York ou Montréal. Il faut s'installer sur place et réfléchir avec les locaux. Un processus de reverse innovation peut même être enclenché : lequel permettra à partir d'offres conçues localement pour les marchés des pays en développement, d'imaginer des produits et des services qui seront proposés sur les marchés occidentaux à des clients de plus en plus sensibles au prix.
- penser techno. Les marchés émergents entrent directement dans le monde moderne, ils adoptent naturellement les dernières générations technologiques. En particulier parce qu'elles sont moins coûteuses en infrastructure. Par exemple M-Pesa est un service de transfert d'argent par téléphone mobile. Lancé au Kenya en 2007, il a gagné 6,5 millions de clients en deux ans et s'est exporté en Tanzanie et en Afrique du Sud.
Remarque pour finir : je suis frappé par la question de l'évolution politique. Ainsi parmi les économies diversifiées quatre sont stables : l'Afrique du Sud, Maurice, le Maroc et la Namibie, et trois connaissances une incertitude politique : l'Egypte, la Tunisie et la Côte d'Ivoire. On peut adopter le point de vue de Tocqueville et considérer que les révoltes populaires adviennent dans des périodes durant lesquelles la situation s'améliore et espérer que leurs situations vont vers l'amélioration et une stabilisation plus démocratique. Du point de vue économique cependant l'incertitude est grande : ces situations seront riches d'opportunités mais aussi d'incertitudes. Il y a des risques à prendre. Peuvent être payants.
dimanche 8 mai 2011
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3 commentaires:
Très bel article. Les réponses apportées soulèvent de nouvelles interrogations concernant les modèles de développement à adopter; car comme vous l'avez justement expliqué les profils des pays africains sont très hétérogènes.
Je suis né en Côte d'Ivoire, et j'aspire à y retourner et contribuer à ce développement ! Il y a encore tellement à faire.
Le plus gros frein aujourd'hui est à mon sens la corruption endémique que connait le continent noir. Faire des affaires n'est pas une mince affaire...
Mikaël Joher
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