jeudi 19 mai 2011

Internet a de l’avenir ☺ LOL PTDR (partie 2)

Pour relancer la réflexion sur l'impact de l'Internet, quelques données :

Quelques chiffres :
Pour la première fois, Amazon a vendu plus de ebooks que de livres papier le mois dernier, soit trois fois que pour la même période en 2010.
En 2010 Skype (fondé en 2003) compte 100 millions d'utilisateurs chaque mois, utilisant plus de 100 millions de minutes de communication audio ou vidéo. L'entreprise a été acquise par Microsoft pour 8,5 milliards de dollars.
Selon une étude du Pew Research Center, pour la première fois en 2010, Internet a surpassé la télévision comme première source d'information chez les 18-49 ans - et plus encore auprès des 18-29 ans.
Netflix, le service de location en ligne de films représente aujourd'hui 25% de la bande passante aux Etats-Unis.

Deux exemples de nouveaux modèle d'affaires :
MyMajorCompany a mis un place un système dans lequel les internautes investissent comme des microproducteurs sur les artistes qui les intéressent. Lorsqu'un certain montant est atteint, le disque est produit. L'entreprise a été lancée par un succès retentissant : Grégoire, parmi les meilleurs vendeurs de disques en France. Fort de ce succès MyMajorCompany s'est associé à l'éditeur XO pour utiliser la même logique pour publier de nouveaux auteurs. Fin juillet 2010 le site comptabilisait déjà 88800 mises d’éditeurs amateurs pour les 104 auteurs présents (plusieurs ont atteint les 20 000 euros nécessaires).

ZapQuébec est un service de mise à disposition d'Internet sans fil gratuit dans des lieux publics (bars, restaurants ou autre). Pour décider des lieux où implanter le service, le modèle a été totalement inversé. Un site a été créé moijezap.org. Là, les internautes peuvent signaler les lieux où ils souhaitent voir implanté le service. Les autres internautes peuvent voter. Lorsque le nombre de votes atteint un certain niveau, un représentant de ZapQuébec va voir le restaurant ou le bar avec des arguments imparables. (Parlez donc à MA14 pour les détails - boîte de ma blonde pour que les choses soient transparentes -. Ce n'est pas du placement produit ;) je crois vraiment que ce modèle de co-construction avec la clientèle a un immense avenir).

Une anecdote :
Pepsi vient de présenter un prototype de "distributeur automatique social". Il permet d'acheter une boisson pour soi et en payant et en entrant un nom et un numéro de mobile, on peut en acheter pour un ami qui ira le récupérer dans la machine la plus proche.


Comment Internet a bouleversé le modèle d'affaires dans le secteur de la musique :

Un constat de base, le piratage a complètement bouleversé le secteur. Selon le «Recording Industry In Numbers 2011» de la Fédération internationale de l’industrie du disque (IFPI), les ventes mondiales de musique ont baissé de 56,9% en dix ans, avec un plongeon spectaculaire entre 2007 et 2008.
En France, les chiffres clés pour 2010 sont les suivants (source : Syndicat National de l'Edition Phonographique) : Entre 2009 et 2010 les ventes en magasins on chuté de 12,7%, alors qu'elles ont progressé de 32,4% en ligne (internet fixe), ce qui ne permet pas de compenser puisqu'on constate une baisse globale de 9,6%. Depuis 2007 la baisse globale est de 30%.
Dans ce contexte les producteurs de disques se sont vus en grande difficulté. Mais qu'en est-il des artistes ?

Une étude de la CEPREMAP (Centre pour la recherche économique et ses applications) s'intéresse à l'impact des technologies sur l'évolution des revenus dans le domaine de la musique permet de répondre précisément à cette question.
Premier constat : entre 2000 et 2010 le revenu médian des musiciens a connu une légère amélioration. Mais alors quid de l'effet du piratage.
L'internaute peut avoir deux objectifs en procédant par téléchargement illégal : remplacer un achat légal (effet de substitution qui réduit les revenus) ou aller voir si la musique lui plait pour découvrir l'artiste avant d'acheter un disque ou d'aller à un concert (effet d'échantillonnage qui peut augmenter les revenus et compenser les effets de substitution). L'étude montre que ces effets jouent différemment en fonction des acteurs car les maisons de disques ne sont pas celles qui recueillent la plupart du temps le plus les revenus générés par les concerts et les produits dérivés, alors que les concerts sont la première source de revenus pour les artistes. Il en résulte que les perceptions sur le piratage varient :

- Les maisons de disques perdent du fait des effets de substitution : elles vendent moins de disques. Il en va de même des artistes autoproduits. Leur perception sur le piratage est très négative.

- Plus les artistes sont connus, plus leur avis vis-à-vis du piratage est négatif.

- Cependant les artistes qui font de la scène ont une perception plus positive : les effets d'échantillonnage contribuent, avec tous les effets de bouche à oreille sur le net, à ce qu'ils se fassent connaître et leurs permettent de remplir des salles et de vendre des disques.
Ce fut le cas par exemple des Cowboys Fringants ou de Mister Valaire. La vidéo ci-dessous montre "la propagation virale de la musique de Mister Valaire depuis septembre 2007, moment où le groupe a opté pour la gratuité de la musique comme propulseur qui leur a permis de joindre plus de 60 000 téléchargeurs situés dans plus de 58 pays différents" (source : blogue de Guillaume Deziel).



- Les artistes qui font peu de scène et travaillent beaucoup en studios y perdent puisqu'ils ne tirent pas bénéfice des effets d'échantillonnage. Leurs perceptions sont plus négatives.


Du 360° au 063°

Le modèle classique de l'industrie est celui dans lequel les maisons de disques enregistrent et mettent en marché des disques et des producteurs gèrent les tournées.

Pour permettre aux maisons de disques de ne pas perdre de l'argent avec un artiste des contrats dits 360° se sont développés. Ils permettent aux compagnies de gérer l'ensemble des droits dérivés de l'artiste : les disques, mais aussi les concerts et autres produits dérivés. (Tel est le choix par exemple de Madonna ou Lady Gaga, ce qui explique que leurs maisons de disque ont tous les intérêts pour les promouvoir).

Un modèle intermédiaire est celui de mymajorcompany dans laquelle, pour permettre de faire émerger de nouveaux artistes, les fans investissent dans leurs favoris ayant un contrat avec la compagnie de production.

Mais un autre modèle d'affaires peut-être imaginé. Il s'agit du contrat 063°, le strict contraire du précédent. Dans ce type de contrat, l'artiste reste seul propriétaire de ses droits. Les nouvelles technologies lui permettent de s'autoproduire (enregistrer et diffuser sa musique, faire sa promotion). L'idée est de réunir autour de l'artiste des investisseurs qui vont mettre de l'argent pour exploiter la "propriété intellectuelle" que constitue l'artiste. Et là tous les supports sont possibles : musique, spectacles, produits dérivés, site internet, jeux, émission TV, etc. Dans ce contexte la musique peut même être considérée comme un produit d'appel pour attirer une clientèle. A ce titre la gratuité peut-être une façon de se faire rapidement une place sur le marché pour des artistes moins connus ou à plus faible diffusion.

Conclusion : et l'art dans tout cela ?

Je dois reconnaître un modèle d'affaires pertinent ne fait pas de la bonne musique. Reste la question du talent.
Cependant des modèles d'affaires plus souples, plus centrés sur l'artiste que sur les profits d'une maison de disque, qui cherchent à monétiser la propriété intellectuelle sous plusieurs supports, peuvent permettre de faire émerger de nouveaux artistes. On voit ainsi se dessiner de nouveaux besoins pour les artistes : des professionnels qui peuvent les aider à exploiter leur production de manière innovante, sous de nouveaux supports.
Pas de doute, le modèle d'affaires de la musique a vraiment été changé par l'Internet. Poursuite de la réflexion dans un prochaine partie. Nous irons faire un tour dans le secteur de la presse.


Un site pour continuer la réflexion : Le blog de Guillaume Déziel - Musique 2.0 : Donner pour mieux vendre

dimanche 15 mai 2011

Internet a de l’avenir ☺ LOL PTDR

Quelques faits qui m’ont frappé, surpris, enthousiasmé ces dernières semaines.

Forte de sa position dominatrice, Google se diversifie en série. En quelques semaines, plusieurs annonces. Google lance la distribution d’ordinateurs équipés de l’OS Chrome et fonctionnant « dans les nuages ». Ils seront fabriqués par Acer et Samsung. Google lance un service de juke-box personnel, « music », qui permet aux utilisateurs américains de stocker en ligne leur musique pour l’écouter de partout. Google expérimente un concurrent de Groupon à Portland. Google va expérimenter les technologies de paiement sans contact ("near field communications" ou "NFC") avec des terminaux mobiles, et financer l'installation de plusieurs milliers de terminaux chez des commerçants de New York et San Francisco.

Autre constat : le jeu en ligne a de l’avenir (et est probablement un secteur clé pour le futur. J’y reviendrai un jour). Exemples.

Le comité sectoriel du commerce de détail du Québec a lancé en avril deux jeux en ligne de formation à la vente (conclure une vente, cerner les besoins des clients, traiter les plaintes). Il est reconnu dans le cursus de formation reconnu par le ministère.

Zynga est le leader des jeux en ligne se greffant sur Facebook. En un mois (décembre 2010) son jeu Cityville a attiré 84,2 millions de personnes. Les joueurs procèdent à des micro-paiements pour acquérir des éléments pour progresser plus vite dans le jeu. Et ça marche. En 2010 l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaire estimé à 450 millions de dollars (en croissance expresse). Le phénomène est tellement fort que cela devient un outil marketing. Ainsi Lady Gaga (ou son producteur) a mis en place un partenariat avec Zynga pour la sortie de son prochain album. A partir du 17 mai, une ferme sera ouverte dans FarmVille (un autre jeu de la marque). Nommée GagaVille, à l’esthétique stylée Lady Gaga (licornes, moutons motorisés et cristaux), les joueurs qui la visiteront pourront écouter des chansons inédites, ils recevront des zCoins, points qu’ils pourront échanger contre des objets virtuels limités qu’ils pourront utiliser dans les jeux de Zynga auxquels les fans aiment jouer.

Des modèles d’affaires différents se mettent aussi en place. Ils s’appuient sur des approches de pull. La chaîne de valeur s’organise à partir de l’agrégation des demandes des clients. Exemples.

garmz.com est une start-up autrichienne. Des designers de partout sur la planète y déposent des dessins de leurs créations, des clients peuvent décider d’acheter. Si le volume est suffisant, les

Myfab.com est une entreprise d’achat direct dans le domaine du meuble. Les clients votent sur les produits qui constitueront la prochaine collection. Lorsque le nombre d’acheteurs d’un produit est suffisant, la production est lancée. Plus d’intermédiaires, plus de stocks : les frais sont réduits, les prix aussi. Les clients peuvent suivre la fabrication et la livraison des produits en ligne.

En passant, on estime qu’en 2011 un milliard de personnes seront équipées de téléphones intelligents.

Et dans les chiffres.....

Moins anecdotiquement, un rapport de McKinsey & Cie, « L’impact d’Internet sur l’économie française » permet de mesurer l’ampleur du phénomène.

Dans cette étude 400 PME ont été interrogées.

Du point de vue macroéconomique :
La filière Internet (télécomm via IP, informatique liée à Internet, activités économiques basées sur le web) a contribué au quart de la création nette d’emplois en France entre 1995 et 2010 (700 000 emplois dont 50% dans des entreprises dont Internet est le cœur d’activité. Auxquels il faut ajouter 300 000 emplois indirects). Et à un quart de la croissance en 2010 (qui certes n’était pas bien forte). Cette contribution s’est accélérée : 10% sur les quinze dernières années, 20% sur la période 2005-2009 et 25% entre 2009 et 2010.
Bilan : la part de la filière représente 3,2% du PIB en 2009, soit plus que l’énergie, les transports ou l’agriculture. En 2015 elle devrait s’élever à 5,5% du PIB. Or la performance de la France en matière de développement de la société de l’information reste moyenne. Si elle s’alignait sur les cinq pays développés de tête, le poids économique en 2015 pourrait être supérieur du quart (160 milliards d’euros potentiels contre 129 milliards prévus). Indice du phénomène : Le secteur public est relativement peu présent. Ainsi alors que les dépenses publiques représentent plus de 23% du PIB en 2009, la part du secteur public (consommation + investissement) ne présente que 13% du PIB de la filière internet (contre 25% au Royaume-Uni par exemple).
Autre indicateur que la France n'est pas à l'absolue pointe : la balance commerciale de la filière internet française est très légèrement déficitaire.

Du point de vue des entreprises :
75% de la valeur-ajoutée créée l’a été par des entreprises traditionnelles ayant développé des activités en ligne. Internet n’est donc pas qu’une affaire de spécialistes, mais bien une technologie qui bouleverse en profondeur l’ensemble des chaînes de valeur des entreprises.
Les entreprises à forte intensité web ont crû deux fois plus vite que les autres et ont exporté deux fois plus. (4% du CA à l’export, contre 2,6% pour la moyenne et 2% pour celles à faible intensité web).
Internet a permis de réaliser 15% de gains de rentabilité en moyenne par la combinaison d’une amélioration du chiffre d’affaires (+8%) et une réduction des coûts (-7%).
Le site de la SNCF est le premier site de e-commerce en France.

Du point de vue des Internautes :
Les internautes français dépensent en moyenne 1000 euros par an dans des achats en ligne contre 1900 euros au Royaume-Uni.
L’étude calcule le « surplus de valeur » créé pour les clients. Il s’agit des services gratuits accessibles sur Internet. Le montant en 2009 a été de 7 milliards d’euros (36 euros par mois et par foyer connecté).
Les réductions de prix des achats sur Internet par rapport aux magasins physiques est estimée à 2,5 milliards d’euros.
53% des internautes ont préparé leur achat en ligne avant d’acheter en magasin. Cela représente un montant de 28 milliards d’euros en 2009 et l’équivalent de 150 000 emplois induits.

Conclusion :

Internet est une technologie au cœur des transformations économiques actuelles. Les entreprises classiques jouent de leurs avantages et l’intègrent dans leurs chaînes de valeur. Ainsi que ce soit dans la distribution de l’épicerie en ligne ou dans les services financiers, hors quelques niches, ce sont les acteurs traditionnels qui ont gagné en s’appuyant sur leurs capacités : image de marque, connaissance des métiers, réseau de partenaires, etc.
Par ailleurs des pure players sont apparus qui proposent des modèles d’affaires parfois surprenants, plus souples, plus pull, dans un mode que Jacques Chaize de manière visionnaire appelait l’hypertexte. C’est à dire une organisation de la chaîne de valeur qui se déclenche en fonction de la demande des clients. Cette approche change effectivement tout : la gestion des opérations, de la logistique, et du marketing.

Dans un prochain message nous verrons sur la base d’une étude du Centre de la Recherche Economique et ses Applications (CEPREMAP) l’impact de l’Internet dans l’économie de la musique.

dimanche 8 mai 2011

L'opportunité Afrique

Dans la Harvard Business Review de mai, un article sur le potentiel de croissance du marché africain.


Un continent en croissance

La croissance du continent est régulière : supérieur à 4% depuis 2003. Avec des sommets en 2004 (5,6%), 2005 (5,2%), 2006 (5,8%) et 2007 (5,9%). Les impacts de la crise se faisant sentir en 2009 avec un petit 2% de croissance.
Depuis 2000 le continent a été la troisième région avec le plus de croissance sur la planète derrière l'Asie du Sud-Est (7,2%) et à égalité avec le Moyen-Orient (4,7%), loin devant l'Europe centrale et de l'Est (4,3%) et l'Amérique Latine (3,1%). Sur la même période la planète avait une croissance de 2,6%, plombée par les pays développés (1,5%).
Depuis 2000 les pays africains ont réduit leur dettes détenues par l'étranger de 82% du PIB à 59% et leurs déficits de 4,6% à 1,8%, et leurs taux d'inflation de 22% à 8%.
Le nombre moyen de conflits sérieux a baissé passant de 4,8 par an dans les années 90 à 2,6 dans les années 2000.
Enfin la croissance démographique du continent lui donne des perspectives uniques pour le futur.

L'émergence d'un marché intérieur

L'Afrique n'est plus seulement un lieu d'investissement pour produire à moindres coûts. Une classe de consommateurs émerge. Les ménages considérés comme des classes moyennes (10 000 à 20 000 dollars de revenus par an) est passée de 11% en 2000 à 14% en 2008 avec une perspective de 17% en 2020. Les consommateurs émergents (5 000 à 10 000 $ de revenus par an) sont passés quant à eux de 18% en 2000 à 21% en 2008 et sont prévus d'être 23% en 2020 (source : McKinsey Global Institute).
Un chiffre étonnant : en 2008 les Africains ont dépensé 860 milliards en biens et services, soit 35% de plus que les Indiens.
Trois considérations en voyant ces chiffres :
- L'ascension sociale est rapide : les classes moyennes se développent plus rapidement que les consommateurs émergents. Un marché de consommation intérieur est en train d'émerger très rapidement. Le développement du marché de la téléphonie mobile est un bon exemple (depuis 2000, 316 millions d'Africains se sont abonnés)
- Les revenus de la classe moyenne restent relativement faibles. Il sera donc nécessaire d'adapter l'offre.
- Enfin cela signifie qu'il reste encore une majorité de la population qui reste dans la misère.

Des situations très contrastées

Les économies nationales sont à des niveaux de développement très différents. Les auteurs distinguent quatre types d'économies en fonction de trois critères :
- la part du secteur manufacturier et de service dans le PIB.
- le montant des exportations par habitant.
- le PIB par habitant.

Les pays les plus riches (PIB par habitant supérieur à 5000$) sont de deux types :
- Guinée Equatoriale, Libye, Angola, Gabon et Algérie ont des économies de rente basées sur l'exploitation des hydrocarbures.
La part du manufacturier et des services y est faible (moins de 50%).
- L'Afrique du Sud et l'Ile Maurice, pays dans lesquels l'industrie et les services représentent plus de 95% du PIB et tournés vers l'exportation. Signalons à ce titre le modèle original de développement de l'Ile Maurice qui s'est tourné vers un développement durable et de qualité basé sur le tourisme haut de gamme et la montée en gamme des entreprises textiles de sa zone franche (son avantage coût du travail s'est réduit avec son développement et les industries bas de gamme se sont délocalisées).

Les auteurs distinguent donc quatre groupes de pays :

- Les exportateurs d'hydrocarbures.
Beaucoup sont riches (voir ci-dessus), d'autres le sont moins comme le Nigéria ou le Congo. Le Tchad est miséreux. Ces économies sont des économies de rente, dépendantes des cours internationaux. Dans certains pays la richesse produite est captée par les proches du régime ou les compagnies étrangères exploitantes, mais d'autres profitent de cette manne pour se diversifier. En Angola il est prévu que la banque de détail croisse de 6,8% par an d'ici 2020, les services de télécom de 5,2% et les biens de consommation hors nourriture de 4,4%. Au Nigéria la contribution des services à la croissance est légèrement supérieure à celle des matières premières.

- Les pays diversifiés.
Plus de 70% de leur PIB est généré par l'industrie et les services. Ils sont aussi très tournés vers l'exportation. Il s'agit de l'Afrique du Sud, la Tunisie, le Maroc, la Namibie, l'Egypte et la Côte d'Ivoire. C'est dans ces pays que la classe de consommateurs est la plus importante. Ils commencent à sérieusement attirer les investissements étrangers. Ainsi Walmart a pis le contrôle du premier distributeur sud-africain, Massmart qui a des magasins dans 13 autres pays africains.

- Les pays en transition.
Zambie, Sénégal, Mozambique, Kenya, Cameroon, Ouganda, Ghana et Tanzanie. La part du secteur primaire (agriculture et ressources) y reste importante. Le marché intérieur est moins développé mais offre des perspectives à plus long terme d'autant que certains de ses pays voient le secteur industriel et de service se développer rapidement.

- Les pays en prétransition.
Mali, République Démocratique du Congo, Ethiopie, Sierra-Leone, sont des pays pauvres, qui, pour certains (Congo, Ethiopie et Mali) se développent rapidement (plus de 7% par an depuis 2000). Ils ne constituent pas des marchés à court terme.


Points d'intérêts

On parle beaucoup du potentiel de développement en Asie du Sud-Est. L'article met en évidence celui qui existe en Afrique en soulignant les diversités de situations en fonction des pays. Pour qui s'intéresse à l'Afrique, l'article met en évidence plusieurs points :
- bien choisir le pays tête de pont et la stratégie d'entrée : croissance organique sur des marchés nouveaux (comme la distribution) ou acquisition sur des marchés déjà développés comme la banque ou les télécoms.
- adapter son offre à la réalité locale. Dans la classe moyenne, les revenus sont moins élevés, il y a aussi une masse de clients pauvres que l'on peut aller chercher. Tout ne peut pas s'inventer depuis les sièges et les centres de recherche occidentaux. La réalité locale impose des façons de voir différentes, révèle de nouvelles opportunités invisibles depuis Paris, New-York ou Montréal. Il faut s'installer sur place et réfléchir avec les locaux. Un processus de reverse innovation peut même être enclenché : lequel permettra à partir d'offres conçues localement pour les marchés des pays en développement, d'imaginer des produits et des services qui seront proposés sur les marchés occidentaux à des clients de plus en plus sensibles au prix.
- penser techno. Les marchés émergents entrent directement dans le monde moderne, ils adoptent naturellement les dernières générations technologiques. En particulier parce qu'elles sont moins coûteuses en infrastructure. Par exemple M-Pesa est un service de transfert d'argent par téléphone mobile. Lancé au Kenya en 2007, il a gagné 6,5 millions de clients en deux ans et s'est exporté en Tanzanie et en Afrique du Sud.

Remarque pour finir : je suis frappé par la question de l'évolution politique. Ainsi parmi les économies diversifiées quatre sont stables : l'Afrique du Sud, Maurice, le Maroc et la Namibie, et trois connaissances une incertitude politique : l'Egypte, la Tunisie et la Côte d'Ivoire. On peut adopter le point de vue de Tocqueville et considérer que les révoltes populaires adviennent dans des périodes durant lesquelles la situation s'améliore et espérer que leurs situations vont vers l'amélioration et une stabilisation plus démocratique. Du point de vue économique cependant l'incertitude est grande : ces situations seront riches d'opportunités mais aussi d'incertitudes. Il y a des risques à prendre. Peuvent être payants.