lundi 5 octobre 2009

Stratégies de crise (partie 1)

Le numéro de Fortune daté du 31 août 2009 était soigneusement entreposé dans une pile sur mon bureau. J’ai profité d’un moment de libre pour m’y plonger. Deux articles décrivent les réponses de grandes entreprises américaines à la crise.

Le message clé : ne subissez pas la crise, repensez votre stratégie, adoptez-vous, il y a des opportunités à saisir ! Exemples.

Home Depot fait face à deux menaces majeures : la crise économique et l’effondrement de l’immobilier, ainsi que la croissance rapide d’un concurrent majeur Lowe. Une remise à plat du modèle d’affaires et de la stratégie d’imposait.

Pour structurer la réflexion, la direction s’est appuyée sur le modèle du Hedgehog concept de Collins. Celui-ci invite à se poser trois questions :


Un leadership produit ciblé

Question 1 : Dans quoi êtes-vous les meilleurs ?

Home Depot répond : la référence produit (product authority).
L’assortiment présent chez Home Depot doit être le plus large en ville. Cependant l’entreprise ne cherche pas à être leader sur toutes les catégories de produits. Elle ne cherche à augmenter son taux de pénétration sur les produits à faibles marges.
Plus finement, Home Depot a réalisé une segmentation de son offre en fonction des représentations du client, en distinguant des produits destination et des produits impulsion. Les premiers sont ceux pour lesquels les clients vont chez Home Depot (par exemple les matériaux d’isolation). Dans cette catégorie, il est essentiel que Home Depot soit la référence, le premier qui vient à l’esprit. Cela nécessite en particulier d’avoir le meilleur prix en ville. En revanche pour les seconds (par exemple des piles), Home Depot ne cherche pas à être la référence, ils peuvent être achetés n’importe où. La pression sur le prix est moindre. C’est l’occasion pour l’entreprise d’augmenter ses marges.


Le défi de l’expérience client

Question 2 : Qu’est ce qui nous passionne ?

Home Depot répond : le client.
L’avantage produit ne suffit pas. Home Depot met au cœur de sa stratégie l’expérience vécue par le client. Cela se traduit très concrètement dans les modes de fonctionnement. Deux exemples. Home Depot recrute des seniors qui peuvent partager leur expérience du bricolage en donnant des conseils très fiables aux clients. L’entreprise a aussi mis en place ce qu’ils appellent des « power hours », périodes de haute fréquentation durant lesquelles tout le monde doit stopper ses activités de back-office pour être en magasin et servir le client.


De la croissance à la productivité et l’efficience

Question 3 : Quel est votre moteur économique ?

Cet élément est peut-être le plus complexe à appréhender dans le modèle de Collins. La question est de savoir quel est l’indicateur utilisé pour mesurer la performance économique.
Home Depot répond : La productivité et l’efficience.
Auparavant Home Depot visait une croissance des ventes par mètre carré. Il s’agit donc d’un changement radical puisque l’objectif n’est plus d’augmenter le chiffre d’affaires par mètre carré (ce qui peut se faire au détriment de la rentabilité), mais d’augmenter la rentabilité à travers la productivité et l’efficience. Concrètement cela se traduit par l’abandon de plusieurs projets de nouveaux magasins, une réduction du personnel de soutien (et 10% de l’encadrement), ainsi qu’une chasse aux coûts (en changeant la marque de café servie aux comptoirs réservés aux professionnels, l’économie fut de 500 000 dollars).
Pour s’assurer que les décisions des directeurs de magasin allaient s’aligner dans la bonne direction, le mode de calcul de leurs bonus a été adapté. L’équilibre entre les objectifs de vente et de profit a été ajusté pour donner plus d’importance au profit.


L’entrevue avec Carol Tome, responsable des finances et des projets de croissance, est d’un – très – rare intérêt, d’une transparence étonnante. J’en conseille la lecture à qui s’intéresse à la stratégie.
Enfin, chers étudiants, l’article montre que les modèles que nous voyons en cours, ici le hedgehog concept, sont vraiment utilisés par les dirigeants.

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