Opportunités et menaces vues par GE
De nouveaux marchés se développent
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Depuis 2000, 600 millions de personnes ont basculé dans la classe moyenne. Selon la Banque Mondiale, cela devrait se continuer au rythme de 70 millions de personnes par an. Enfin… c’était avant la crise. GE y voit évidemment une opportunité pour son développement. Ainsi la part du chiffre d’affaires de GE réalisée hors des Etats-Unis est passée de 19% en 1980 à plus de 50% aujourd’hui.
Cependant au-delà de ce marché, il existe un marché de masse, encore très pauvre. Ainsi GE a constaté par exemple que 90% de la population chinoise (ce qui fait du monde) dépend de cliniques ou d’hôpitaux ruraux, mal financés. La question que GE s’est posée : peut-on s’attaquer à ces marchés délaissés par les concurrents ?
Autre constat : dans de nombreux pays s’est développée une main d’œuvre de qualité.
Une nouvelle concurrence s'affirme.
Ce développement a permis aussi le développement d’entreprises locales (voir par exemple le cas d’école du développement de l’Inde dans l’industrie du médicament générique) qui s’attaquent aujourd’hui aux marchés développés. Parmi ces Multinational Corporations (MNC) : Tata, Gazprom, China Mobile, Lenovo, Mittal, Cemex, ou Embraer. Ainsi les pays en émergence comptaient 70 entreprises dans le Fortune Global en 2007, contre 20 en 1997.
GE sent qu’elle aura des difficultés face à cette nouvelle concurrence. En effet ces entreprises ont réussi sur des marchés locaux où leurs clients ont peu de pouvoir d’achat, avec des offres à faible coût. Ainsi, les solutions à succès sur ces marchés sont celles réalisant 50% des résultats, pour 15% des coûts.
Elles ont ainsi développé des capacités qui pourraient leur permettre d’être pertinentes sur les marchés occidentaux touchés par les crises successives et en quête de simplicité. Par exemple GE a acheté pour 20 millions une compagnie aéronautique tchèque qui avait développé un moteur d’avion. En investissant 25 millions supplémentaires, GE prévoit de concurrencer Prat & Whitney avec un moteur à la moitié du coût.
De la glocalization à la reverse innovation
La stratégie classique face à la mondialisation est la glocalization : le développement de produits dans des centres de recherche dans les pays d’origine qui sont adaptés pour les marchés locaux. Cela permet de jouer d’effets d’échelle qui financent la R&D.
Cependant pour s’attaquerPour faire face, GE a mis en place une nouvelle stratégie : la reverse innovation. L’idée est d’installer les centres de recherche dans les pays en développement pour développer des technologies produisant des résultats moindres (disons 50%) pour un coût très réduit (disons 15%). Ces technologies permettent :
- de répondre aux besoins de la masse du marché sur les marchés émergeants (et pas seulement à ceux de la classe moyenne),
- de créer des offres adaptées aux nouvelles réalités des marchés développés (notamment une tension sur les prix) qui peuvent être réimportés.
Le cas de GE Healthcare
GE Healthcare est spécialisé dans l’équipement d’imagerie médicale. A la fin des années 80, le choix technologique se porte sur les ultrasons. Pendant longtemps, GE Healthcare a développé des produits coûteux, mais moins que la génération précédente. En 2002, la compagnie lance son premier outil compact (combinant un laptop avec un logiciel) pour 30 000$. Enfin en 2007 la nouvelle génération coûte 15 000$, soit 15% du coût d’une « grosse » machine.
Ce nouveau produit développé en Chine, sont des succès considérables dans les cliniques rurales où les médecins les utilisent pour des applications simples. D’autre part, ce produit a permis le développement de nouvelles applications « légères » sur les marchés occidentaux : lorsque la portabilité est importante, par exemple sur des lieux d’accidents.
Conclusion : la prochaine vague de délocalisation ?
GE est un benchmark : ce que fait GE est précisément analysé par toutes les entreprises de la planète. La preuve : son CEO, Immelt, écrit dans la Harvard Business Review. Il m’apparaît que la stratégie de reverse innovation est un signal faible d’une nouvelle menace sur les économies occidentales.
Nous avons déjà vécu une vague de délocalisation industrielle. La reverse innovation fait peser la menace de la délocalisation d’activités de R&D. Que va-t-il nous rester ? Le haut de gamme, la frontière technologique, l’innovation de rupture. Une pression supplémentaire pour innover.
2 commentaires:
Un signal faible d'une nouvelle menane sur nos économies, je vous l'accorde. Il faudra voir combien de temps prendra l'entreprise tchèque pour atteindre le niveau de qualité des moteurs P&W. L'entreprise prendra sans doute plusieurs années avant d'avoir un impact en dehors de l'Europe.
D'accord avec vous.
L'exemple de GE Health Care est plus frappant. Une différence entre les deux qui peut aider à réfléchir à la question : reverse innovation externe pour les moteurs d'avion (rachat), reverse innovation interne pour GE Health Care (dans ce cas la culture de qualité à la GE est déjà implantée).
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